On the road

Publié le par radiopipette.over-blog.com

Cinquième étape. J’écris mon premier article « on the road ». Il fait un temps de chien, Jupiter gronde et les cumulus se lâchent ; alors là, complètement ; grande lessive du paysage. Mais… je suis bien au sec dans une caravane. Quoi ? Moi dans une CARAVANE ? Eh oui, grande expérience existentielle. Bon , ça demande un peu d’explications. Je me trouve dans une forêt du département de la Marne, vers Saint Dizier. Je roulais pas mal cet aprem. Quand, tout à coup ; le ciel s’est noirci et d’un seul coup il se met pleuvoir et pas de la piquette. De la bonne grosse (passez-moi l’expression) salope d’averse, raide, froide qui vous rince le corps et vous humidifie l’esprit en moins de deux. Je suis au beau milieu d’une forêt. J’essaie de m’abriter sous un chêne qui fait ce qu’il peut, je dois dire, mais se fait tout de même dépasser par les évènements, tant le ciel se déchaîne. Tonnerre de Brest ! Je suis un pèlerin baptisé. Il y a non loin une abbaye, l’abbaye de 36 Abbaye de Trois fontaines bisTrois fontaines. Je me dis : ces bons moines ne me laisseront pas dehors. Profitant d’une (pseudo) accalmie, je remonte sur mon vélo et finit par y arriver. Pas de pot ! Les moines sont tous partis au père la châsse et l’abbaye est complètement désaffectée. Une mégère devant sa porte me dit avec un petit sourire que j’ai 10 km jusque St Dizier et qu’il n’y a  « rien de rien !! » où se mettre au sec dans le coin. Bon, bon, me dis-je. Me voila bien. Dans quel plan foireux me suis-je mis avec mon vélo et ma tente une personne qui ne perce pas… une fois qu’elle est montée. Je m’abrite (c’est beaucoup dire) sous l’arcade à l’entrée de l’abbaye, je visite un peu les lieux, trouve une galerie au sec où j’imagine passer la nuit. Et soudain une apparition : une dame sous un parapluie qui me dit, un peu avec le ton de Valérie Lemercier dans Les visiteurs : « Vous êtes pèlerin ? . Voulez vous vous réchauffer ? Il y a ici quelqu’un qui possède une caravane pour les pèlerins, vous pourriez y passer la nuit. Ne bougez pas, je reviens ».

Je n’ai surtout pas bougé.

Elle est revenue, avec un gars jovial et sympa. Elle m’a offert du café chaud puis le monsieur m’a installé dans cette caravane, sans grand confort, mais dans ma situation, être au sec est le top du confort.39--Trois-fontaines-bis.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  

Parti de chez moi il y quelques jours. Le soleil déclinait jeudi dernier quand j’ai embrassé ma famille 2 Anne et Michel au petit matinet les amis venus boire un verre sur le bord de la route – ça c’était vraiment chouette – et pris la route au milieu d’une folie de cris et d’encouragements de tous. L’image qui me reste : je roule dos au soleil et mon ombre s’allonge démesurément devant moi, comme pour m’emporter loin. En fait j’ai roulé 35km ce soir là et me suis retrouvé dans la nuit noire avec une lumière peu efficace, mon vélo mal équilibré, qui tanguait dans tout les sens, et les voitures qui me frôlaient. Une bonne trouille pour commencer mais j’ai fini par arriver sans mal et soulagé chez Michel et Anne qui m’attendaient avec une bonne soupe.

Mes trois premières étapes ont été belges et ensoleillées : le Condroz, la Famenne (Resteigne) puis l’Ardenne (ça monte raide) et le Gaume (Orval). J’ai ensuite traversé sous un ciel gris la région de l‘Argonne, que je ne connaissais pas. Un paysage très doux, légèrement vallonné de forêts et de campagnes avec ça et là, des points culminants qu’ils appellent des butes. On est à côté de Verdun. Il y a un siècle cette région était une campagne nue, complètement dévastée par l’artillerie de la Grande guerre (comme si la guerre pouvait être grande ?) Cela fait drôle de penser cela en regardant les champs remis en ordre et les forêts aujourd’hui repoussées, mais le paysage parsemé de cimetières - de plusieurs centaines de tombes - et de monuments à la mémoire de jeunes gars qui sont venus là des quatre coins du monde pour y mourir dans une boucherie lamentable.

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Là j’arrive dans la Marne que je traverserai demain matin pour rejoindre la vallée de l’Aube.

 

C’est mon deuxième jour de voyage en terrain inconnu, après avoir dormi plusieurs nuits chez des amis. Je mentirais si je disais que tout est rose. En fait, le démarrage a été plutôt dur physiquement. Disons le platement : j’ai mal aux cuisses, aux mains et au derrière ; et mon vélo chargé est un mastodonte à piloter et à propulser (Enfin, aujourd’hui, il me semble que ça allait mieux et je suis optimiste). Mais des aventures comme cette fin de journée, ça rachète les difficultés pour un prix plus qu’honnête. J’étais un peu inquiet en quittant la Belgique hier matin, après une chouette soirée avec mon amie Madi, à Orval.

 J’avais comme une impression d’être au bord du vide et de devoir sauter ; même si on m’avait dit que « tu vas voir tout ce dont on a besoin se trouve sans problème, tchic et tchac… » Eh bien oui, disons le carrément, j’avais un peu le frôyon (le frôyon, c’est quand vous avez la trouille et que la peau des fesses se tend quelque peu) Mais, déjà hier soir, je n’ai pas trouvé le camping attendu mais bien une magnifique prairie haut perchée avec une chapelle et un prieuré dont les habitants ont mis leur douche à ma disposition. Aujourd’hui, je me dis que voyager, c’est savoir attendre qu’il se passe quelque chose. Et ça finit par être là.

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A+

 

Pierre

 

 

 

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